Une démonstration du principe de récurrence
Atteindre l'infini à partir de l'existence d'un plus petit nombre
Y. Morel
Le principe de récurrence permet de démontrer un ensemble infini et dénombrable de propriétés. On note par exemple Pn ces propriétés.
Pour démontrer que toutes les propriétés Pn sont vraies, à partir d'un premier entier n0, on démontre tout d'abord que la première de ces propriétés Pn0 est vraie (initialisation), ensuite on démontre que cette véracité se propage "de proche en proche": si pour un entier n quelconque Pn est vraie, alors la propriété suivante Pn+1 est aussi vraie.
Le principe de récurrence est celui qui permet alors justement de conclure, à partir de ces deux étapes, que toutes les propriétés Pn, sont vraies, dès le premier n0, jusqu'à … l'infini.
Ceci est très souvent vu et appris comme un "principe": assez "logique", assez "évident" même …
On peut néanmoins le démontrer, et transformer ainsi ce "principe de récurrence" en "propriété de récurrence".
Une démonstration de ce principe, permettant de démontrer des propriétés Pn pour des entiers n jusqu'à l'infini, repose au contraire sur l'existence d'un plus petit nombre entier dans un ensemble d'entiers:
Propriété
Tout sous-ensemble de N non vide possède un plus petit élément.
Cette propriété admise ici est des plus simples: un sous-ensemble de N est un ensemble de nombres entiers naturels.
Ces nombres sont donc au moins positifs, plus grands que zéro, et peuvent être ordonnés: il y en a nécessairement un plus petit que tous les autres.
Cette nécessité repose sur le fait qu'on manipule ici des nombres entiers, voir la remarque à la fin.
À partir de cette propriété, le principe de récurrence est un théorème:
Théorème:
Soit
P0,
P1, …
Pn, …
une suite de propositions telles que
- P0 est vraie
- pour tout entier n, si Pn est vraie, alors Pn+1 est aussi vraie.
Démonstration:
Supposons au contraire, par l'absurde, que pour un certain entier n,
Pn soit fausse.
On note alors A = { k∈N, Pk est fausse} qui est donc un sous-ensemble non vide de N.
D'après la propriété précédente, l'esnemble A admet donc un plus petit élément, que l'on note m, et on a donc
Ainsi, il n'existe pas d'entier n tel que Pn soit fausse.
En d'autres termes, toutes les propositions Pn sont vraies, donc pour tous les entiers n.
On note alors A = { k∈N, Pk est fausse} qui est donc un sous-ensemble non vide de N.
D'après la propriété précédente, l'esnemble A admet donc un plus petit élément, que l'on note m, et on a donc
- m∈A, ce qui signifie que Pm est fausse
- m−1∉A, ce qui signifie que Pm−1 n'est pas fausse, donc est vraie.
Ainsi, il n'existe pas d'entier n tel que Pn soit fausse.
En d'autres termes, toutes les propositions Pn sont vraies, donc pour tous les entiers n.
Remarque: Le point clé du principe (ou théorème maintenant) de récurrence est la dénombrabilité: on numérote les propriétés Pn avec les entiers naturels, pour lesquels on a la propriété d'existence du plus petit élément.
Pour les nombres réels, cette propriété est fausse: tout sous-ensemble de R, non-vide, n'admet pas nécessairement un plus petit élément. Par exemple, le sous-ensemble E = ]0;3] n'en admet pas.
0∉E et pour tout nombre réel x∈E, on peut trouver un réel y∈E tel que y<x; on peut par exemple prendre y = x2.
Ainsi, aucun nombre x de Ene peut être le plus petit élément, on peut toujours en trouver un plus petit.
Voir aussi